Alors que la disparition de la chaîne C8 de la TNT continue de faire couler beaucoup d’encre, un autre acteur majeur du paysage audiovisuel français s’apprête à tirer un trait sur son format traditionnel. Il ne s’agit pas cette fois d’une chaîne de télévision, mais d’une station de radio emblématique qui pourrait, elle aussi, quitter les ondes… et pas n’importe lesquelles.
Un climat de transformation dans l’audiovisuel français
L’annonce récente de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), qui a décidé de ne pas renouveler la fréquence TNT de C8, a été un véritable électrochoc. Sanctions, controverses éditoriales, manque de diversité de contenus : autant de raisons évoquées pour justifier l’arrêt de la chaîne. Mais au-delà du cas C8, cette décision semble marquer une tendance plus large : celle d’une remise en question des formats traditionnels dans un univers médiatique en pleine mutation.
Et cette fois, c’est la radio qui est dans le viseur. À l’heure où les jeunes délaissent de plus en plus la FM au profit des podcasts, du streaming musical et des réseaux sociaux, certaines stations doivent se réinventer… ou disparaître.
Une station à l’identité forte bientôt privée de la FM ?
Selon plusieurs sources concordantes, Radio France envisage de transformer l’une de ses stations en profondeur. Le projet ne se limite pas à une simple évolution de la grille : il s’agirait de cesser totalement la diffusion sur la bande FM.
En interne, on parle d’un repositionnement stratégique pour coller davantage aux nouvelles habitudes d’écoute des jeunes publics. Exit les animateurs, les chroniques en direct, les débats et les émissions de plateau : la radio deviendrait un flux musical en continu, centré sur les genres les plus plébiscités — notamment le rap, le R’n’B et les musiques urbaines — avec une diffusion exclusivement numérique, via Internet et le DAB+.
Une consultation avec les syndicats est prévue dans les prochaines semaines, mais la direction semble déjà bien avancée dans sa réflexion. L’annonce officielle pourrait intervenir avant l’été, pour une mise en œuvre à la rentrée 2025.
Un virage numérique déjà amorcé
Ce changement de cap ne tombe pas du ciel. Depuis plusieurs mois, la station concernée multiplie les initiatives digitales : webradios thématiques, sessions de freestyle filmées et diffusées sur les réseaux, présence renforcée sur YouTube et TikTok, refonte de l’application mobile… Tout indique une volonté assumée de se tourner vers un modèle 100 % connecté.
Une stratégie cohérente dans le contexte actuel, mais qui soulève une question : peut-on réellement remplacer l’animation en direct et l’esprit d’antenne par des algorithmes et des playlists ? Certains observateurs redoutent que ce changement marque la fin d’une certaine idée de la radio vivante et engagée.
Et cette station, c’est…
Le nom n’avait pas encore été prononcé, mais vous l’aurez peut-être deviné : la station en question est Mouv’, la radio jeune de Radio France, historiquement dédiée à la culture hip-hop, aux artistes émergents et aux voix minoritaires.
Depuis son repositionnement en 2015, Mouv’ a su s’imposer comme une référence incontournable dans le paysage musical français. Elle a révélé des talents, donné la parole à des artistes ignorés par les grandes radios commerciales, et proposé des émissions cultes comme After Rap, La Sauce ou encore les désormais célèbres Mouv’ Rap Club.
Mais malgré son ancrage fort dans les cultures urbaines, Mouv’ peine à trouver son public sur la bande FM. Ses audiences restent modestes, surtout en comparaison de ses performances en ligne. D’où cette volonté de couper les ponts avec la radio traditionnelle pour se concentrer sur le numérique, là où se trouvent ses auditeurs.
Une transition douce… ou brutale ?
Pour certains, cette décision est logique, presque inévitable. Pour d’autres, elle est précipitée, voire brutale. Car abandonner la FM, c’est aussi renoncer à une forme d’accessibilité universelle : celle qui permet d’écouter une radio gratuitement, sans connexion, en voiture ou dans les zones rurales. C’est aussi dire adieu à une équipe éditoriale, à des personnalités de l’antenne, à une voix humaine derrière le micro.
Reste à savoir si cette transformation permettra à Mouv’ de se réinventer, ou si elle sera le début d’un effacement progressif dans un océan numérique déjà saturé.
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